Examen de religion de sixième

L’examen se déroulera avec le cours à sa disposition.

Il s’agira de produire, à partir d’une question, une réflexion personnelle développée (au moins 300 mots) sur la question de Dieu.

En combinant approche esthétique, approche réflexive et éthique, approche contemplative.

Sera évoqué le récit de Caïn et Abel, au moins un extrait de l’exercice « Si Dieu était… », ainsi que plusieurs des points de matière suivants :

L’approche esthétique :

L’approche esthétique envisagera Dieu davantage du côté du « beau », de ce qui « plaît », de ce qu’on « goûte ». Le « bon » plutôt que le bien, le juste, le « il faut ».

Les traditions religieuses regorgent de récits, de poèmes, d’œuvres artistiques où Dieu est approché esthétiquement, symboliquement. Ce qui est recherché est la « justesse ».

Un aspect important de l’approche esthétique est que la représentation de Dieu qui en découle doit être considérée comme imagée, métaphorique, symbolique. Les représentations de Dieu qui y apparaissent ne sont pas des représentations factuelles.

L’approche éthique

Les catégories du « juste », de la « justice », permettent pourtant une approche de Dieu.

Ce qui est alors visé est Dieu comme garant de « l’ordre du monde ». Dieu pourra être envisagé comme un modèle de vie morale à imiter, ou il pourra être envisagé comme un législateur-juge chargé de maintenir ou de rétablir l’ordre.

L’approche réflexive, rationnelle

L’être humain est capable de s’interroger et de raisonner sur des questions métaphysiques extrêmement fondamentales – même si elles dépassent le cadre de ce que son intellect peut comprendre. Ainsi la fameuse question de Leibnitz : pourquoi existe-t-il (et continue-t-il à exister) quelque chose et non pas plutôt rien ?

Dieu sera classiquement posé comme le créateur de ce qui existe (créateur « continu » puisqu’il maintient dans l’existence ce qui existe). La raison, la réflexion, s’interdira alors de faire de Dieu un être parmi les êtres, s’interdira de le caractériser comme on caractérise les êtres qui nous entourent. On voit ainsi la rationalité de l’un des dix commandements, transmis dans la tradition judaïque et chrétienne : celui qui interdit de faire quelque image de Dieu. Un autre aspect de l’approche rationnelle de la question de Dieu : les théologiens considéreront qu’il faut se refuser à affirmer des choses irrationnelles, déraisonnables, à propos de Dieu.

L’approche contemplative : la question du mal

L’approche contemplative dans la foi et la prière

Une autre voie est la prière contemplative. Plutôt que de réfléchir, le croyant, la croyante, cherchera à contempler Dieu pour « voir » ce que sa foi et la foi des croyants (foi collective reçue à travers diverses traditions religieuses) lui « disent » de Dieu.

Une médiation sera nécessaire : le texte d’un croyant, un épisode de la vie d’un saint ou d’une sainte, une prière traditionnelle (le Notre Père, par exemple), un passage des Écritures, de la Bible.

La contemplation dont il est ici question n’est évidemment pas une contemplation extérieure : la croyante, le croyant ne contemple pas Dieu comme il contemple un paysage : c’est une contemplation intérieure.

Aborder la question du mal (et de la relation de Dieu au mal) dans une démarche contemplative, à partir des textes bibliques, peut permettre au croyant, à la croyante, de sortir des impasses de l’approche rationnelle en donnant à contempler un Dieu différent.

  • Le récit de la création (Genèse, chapitre 1) nous présente Dieu comme créateur d’un monde essentiellement bon (et même très bon, une fois que l’être humain y est créé), mais aussi l’image d’un Dieu qui se retire du Monde, qui accepte de ne pas l’influencer (repos du septième jour).
  • Le chapitre 3 de la Genèse y montre Dieu absent quand l’être humain cède au mal, puis Dieu qui ne voit pas l’être humain quand il s’est caché (Dieu cherche et appelle l’être humain)
  • Au chapitre 4 de la Genèse, Dieu n’empêche pas le meurtre d’Abel par Caïn, mais il responsabilise Caïn quand il le voit tenté. Et quand Caïn est devenu meurtrier, il interdit toute vengeance à son endroit.
  • Dans les Évangiles, Jésus combat le mal, ne transige pas avec lui (sa sainteté, c’est cela : l’intransigeance face au mal), mais est écrasé par lui quand il est crucifié. La foi des chrétiens reconnaît Jésus comme Dieu qui a assumé, dans l’histoire, la nature humaine. Elle voit Dieu (comme l’être humain) comme victime du mal – même s’il en triomphe dans la Résurrection.

Analyse du récit de Caïn et Abel à partir de la notion de « seum » et contemplation de l’attitude de Dieu

  • Le seum, le ressentiment, débouche sur le meurtre.
  • Ce seum est d’autant plus intense que celui qui nous le fait éprouver est un proche, un « frère ». Le peuple français est, parmi les peuples européens, celui qui est le plus proche, le plus « frère » du peuple belge (en tout cas des Belges francophones – pour les Belges flamands, c’est sans doute plutôt le peuple hollandais). Parce qu’alors, le frère devient un « frère ennemi » et que la haine envers un frère ennemi est souvent la plus intense de toute. Raison pour laquelle les Belges francophones se réjouissent si souvent « quand la France perd » ?…
  • Dans ce récit, le mal n’est jamais la fin de tout pour l’humanité : Caïn aurait pu échapper à son ressentiment s’il avait écouté Dieu, la fin du récit nous montre que sa vie n’est pas finie : comme Adam et Ève qui ont péché avant lui, il se mariera et aura des enfants. De plus, il permettra à l’humanité de découvrir une autre forme de civilisation que la civilisation pastorale (Abel, l’éleveur de bétail) et agricole (Caïn, avant, était agriculteur) : la civilisation urbaine – Caïn sera le fondateur de la première ville à laquelle il donnera le nom de son premier fils. Quand l’homme a commis le mal, il peut faire du bien dans la suite de sa vie.
  • L’attitude prêtée à Dieu mérite d’être contemplée :
    • Il n’est pas indifférent au drame qui se noue intérieurement chez Caïn et qui peut déboucher sur le drame extérieur de l’assassinat.
    • Il intervient en cherchant à conscientiser Caïn et à le responsabiliser. Il le valorise en le regardant comme capable de ne pas se laisser dominer par la bête féroce du mal qui est à son affut et qui pourrait le pousser au meurtre.
    • Faut-il lire le fait que Dieu chasse Caïn comme simplement un châtiment ? En le séparant du lieu où tout lui rappellera le crime commis, Dieu ne permet-il pas à Caïn de se refaire une vie ailleurs ? de redevenir quelqu’un de bien  : sous une forme nouvelle.
    • Dieu, dans ce récit, protège la vie et lui permet de continuer à se déployer, y compris pour l’assassin. Il stoppe le cycle de la vengeance qui, logiquement, amène à tuer l’assassin puisqu’il a tué… C’est le sens du signe placé sur Caïn et de la menace qui l’accompagne.

Analyse théologique d’une fable de La Fontaine (Le Lion et le rat)

Le rat devient « Seigneur» (sire) et ce qu’il fait semble énorme (« fit tant » : délivrer un lion qui ne peut se défaire du filet où il est pris malgré toute sa puissance – comme nous sommes pris dans les rets de cette mortelle existence).

Mais ce qu’il fait est en réalité tout petit, quasi rien,  » hébélien  » : ronger une maille de ses petites dents et ainsi permettre que se défasse tout l’ouvrage.

Dieu agit-il ainsi dans l’histoire ? Serait-ce pour cela que nous ne l’entendons pas, ne le percevons pas ? Ne se fait-il pas, comme le rat de la fable, tout petit – extra-minime – et défait le filet où nous sommes pris dans une articulation si minime qu’elle est pour ainsi dire inaccessible à notre grandeur.

Certes l’homme est-il capable de penser et d’agir dans le minime, mais le minime qu’il conçoit et crée dans sa finitude est encore énorme par rapport à l’infiniment plus minime où pourrait agir l’infini divin.

Il n’est donné qu’a l’infini divin d’œuvrer dans l’extra-minime, comme le rat de la fable.

Bien sûr le résultat de l’action extra-minime ne se fait encore guère sentir. Le filet se défait bien lentement.

Attendons la suite de l’histoire : Patience

Lire l’action de Dieu de façon incriminante (comme le serpent) ou de façon désincriminante ?

Lire selon le serpent ?

Autrement dit — et c’est la clef de lecture annoncée —, les grands récits de la Genèse (premier livre biblique) proposent toujours cette double lecture possible :

  • une lecture qui incrimine Dieu
  • une lecture qui désincrimine, innocente, décriminalise Dieu

Vous retrouvez assez clairement cette clef de lecture dans le premier dialogue théologique de la Bible : le dialogue entre la femme et le serpent. N’est-ce pas le sens profond de ce récit qui ouvre l’histoire : une indication sur la manière de lire correctement la suite.

Le serpent : « Alors, Dieu a dit : Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? » (plus tard il dira qu’il se réserve la puissance que le fruit de l’arbre défendu en question offre).

Ève : Nous pouvons manger du fruit de tous les arbres. (elle ajoute ensuite que Dieu a dit, mais dans un second temps, de ne pas manger du fruit de l’arbre sous peine de mourir)

Le serpent incrimine Dieu. Il fait croire à Ève que Dieu est un dieu pervers, jaloux de sa puissance, un dieu du non, de l’interdit. Ève désincrimine Dieu en corrigeant l’ordre des choses : Dieu offre tout puis « interdit » ou « recommande » ou « signale » qu’une chose néanmoins doit être évitée : manger de l’arbre de la connaissance (pas théorique, mais expérimentale) du « bien et du mal », « du bonheur et du malheur », du « bon et du mauvais ». Dieu, pour elle, est d’abord Dieu du don, Dieu du oui, Dieu généreux qui se soucie du bien de l’homme.

La différence est subtile, mais c’est tout différent. Puis le serpent enfoncera le clou de la calomnie : Dieu, d’après lui, se réserverait la connaissance, craindrait que l’homme devienne son égal. Vraiment ? Ce n’est pas ce que dit un Évêque, saint Irénée de Lyon, au 2e siècle : Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu.

Revenons à Caïn. Le serpent nous suggérera que quand même, ce dieu, il chasse Caïn, il le vire, et que ce n’est pas très paternel (lecture incriminante). Et en effet, Il le « chasse du sol fertile qui a ouvert la bouche pour recevoir le sang de son frère« . Mais vous, si votre fils tuait son frère, vous ne changeriez pas de maison ? vous ne préféreriez pas que le meurtrier qu’est devenu votre enfant puisse vivre ailleurs que dans un lieu où tout lui rappelle son crime (lecture désincriminante) ?

En outre, après que Caïn Lui a dit que le premier venu le tuera, Dieu au contraire le protège en plaçant sur lui un signe dissuasif. Il lui permet donc de se « reconstruire » comme on dirait aujourd’hui : Caïn « s’unira à sa femme, elle deviendra enceinte et mettra au monde Hénok. Il construira une ville et l’appellera du nom de son fils : Hénok.  » (Livre de la Genèse 4, 17). Caïn ne sera plus un homme des champs, mais un constructeur de ville.

Cet exercice de désincrimination de Dieu nous pouvons nous y essayer sur tous ces immenses textes de la Bible.

Exercice difficile ? peut-être plus difficile en effet que la lecture incriminante qui « cherche des poux. » Souvent notre premier réflexe…

La religion est-elle une illusion ? les philosophes du soupçon…

I Freud (1856-1939)

Sigmund Freud, inventeur de la psychanalyse, publiera également un livre à la fin de sa vie : L’Avenir d’une Illusion où il défend notamment, contre l’illusion religieuse, la véracité scientifique

 « Nous avons entendu l’aveu que la religion n’a plus sur les hommes la même influence que jadis (il s’agit ici de la culture eurochrétienne). (…)  Reconnaissons que la raison de cette transformation est le renforcement de l’esprit scientifique dans les couches supérieures de la société humaine. »

Freud est un scientiste : Le scientisme est une forme de matérialisme (affirmation selon laquelle n’existe que la matière) apparue au 19ème siècle pendant l’essor des sciences. Le scientiste considère que la science seule peut dire la vérité au sujet du réel. Les scientistes les plus extrêmes sont convaincus qu’un jour la science aura tout expliqué de ce réel.

De plus, pour lui, l’adhésion à une religion s’explique par une recherche illusoire de consolation pour apaiser notre angoisse, notre détresse :

 « Nous savons déjà que c’est l’effrayante impression de désarroi chez l’enfant qui a suscité le désir de protection – protection par l’amour – qu’a comblé le père, et que c’est la notion de la persistance de ce désarroi tout au long de la vie qui a fait se raccrocher à l’existence d’un Père – mais désormais plus puissant. Du fait de l’action bienveillante de la providence divine, l’angoisse devant les dangers de la vie est apaisée, l’instauration d’un ordre éthique du monde assure que s’accomplisse l’exigence de justice restée si souvent inaccomplie au sein de la civilisation humaine, le prolongement de l’existence humaine par une vie future fournit le cadre spatial et temporel dans lequel sont censés avoir lieu ces accomplissements de désirs. »

II Feuerbach (1804-1872

Dieu, écrit-il dans L’essence du christianisme (livre publié en 1841), n’est qu’une idée, une illusion, une projection que l’être humain fait de lui-même en imaginant un être humain parfait qu’il dote de toutes les qualités idéales que l’humanité pourrait avoir si elle prenait soin de les développer.

Pour Feuerbach, la religion et la croyance en Dieu aliènent l’humanité (la rend « étrangère » à elle-même : alienus = étranger). En effet elle trompe l’humanité en lui faisant croire que seul Dieu peut être Dieu alors qu’en réalité, « Dieu » n’est que l’ensemble des qualités auxquelles parviendrait l’humanité si elle prenait conscience que « Dieu » n’est qu’un double d’elle-même. La religion est un « vampire » de l’humanité. Dieu est le miroir de ce  l’humanité deviendrait si elle cessait d’y croire.

Feuerbach estime que les humains mûriraient s’ils abandonnaient les religions monothéistes au profit d’une religion de l’homme.

III Nietzsche (1844 – 1900)

Nietzsche est avant tout un penseur du tragique du réel. Il est vain, pour lui, de chercher une « raison » qui justifie que le réel est comme il est : terrible, voué à la souffrance.

Il est également un opposant à la morale qui croit pouvoir imposer ses valeurs au nom d’une réalité qu’il faudrait transformer pour la rendre plus justifiable.

Pareille démarche est, selon lui, nihiliste parce qu’elle ne prend pas en compte que le réel est ce qu’il est et ne peut être que ce qu’il est. Il n’est pas d’autre monde possible, ni souhaitable (dommage que les totalitaires du xxème siècle – Staline, Hitler, Pol Pot  – n’aient pas été nietzschéens : leur volonté de changer le monde et de changer l’humanité a débouché sur des enfers).

La religion est également, pour Nietzsche une illusion : elle ferait miroiter, pour « après la mort », un autre monde plus juste, plus satisfaisant, qui n’est qu’une échappatoire au tragique réel.

Le nihiliste moralisateur, pour Nietzsche, refuse que le monde est comme il est : lui reste-t-il une autre alternative que de prendre, comme Calimero, son baluchon et de chercher une porte de sortie ?

IV Marx (1818 – 1883)

Philosophe et économiste, Marx considère également comme une illusion la religion et l’arrière-monde de bonheur qu’elle promet après celui-ci. C’est un « opium du peuple », une drogue que les puissances économiques capitalistes utilisent pour endormir le prolétariat et éviter sa révolte contre un système économique et politique injuste.

Marx s’appuie sur le lien entre les classes sociales supérieures et le pouvoir religieux.

Héritier de Feuerbach, Marx prônera une société humaine communiste athée, société sans classe, où l’humanité devrait pouvoir se réaliser à la perfection en abandonnant la religion qui la maintient en état d’aliénation.


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