Repères pour discerner et choisir (d’après les Exercices Spirituels de saint Ignace de Loyola)

1) Sortir de l’indécision

Choisir est toujours un risque : nous devons renoncer à certaines choses (choisir, c’est renoncer), nous risquons de déplaire, nous avons peur, ne sommes pas sûrs de nous, ignorons les conséquences du choix… Alors nous pouvons, par crainte, préférer ne pas choisir. En nous laissant porter par les événements, en faisant comme tout le monde, comme « on » nous dit de le faire, parfois en n’osant pas nous décider, en restant indécis.

Une autre cause de l’indécision : nous sommes trop  » esclaves » de telle ou telle chose… et il faudrait nous en détacher pour être capable de faire un choix. Parfois notre temps est tellement « pris » qu’il n’y a plus de place pour choisir du neuf. Nos désirs peuvent être insatiables et nous enfermer.

2) Découvrir notre désir profond

Nous n’avons pas à être quelqu’un d’autre que nous. Ce qui guide nos choix doit être notre désir profond, personnel. Pour choisir, il est important d’être d’abord à l’écoute de nous-mêmes, de notre « don » profond (en spiritualité chrétienne, on parlera de « charisme »). Quelle est notre « idée-force », celle qui pourrait résumer nos dons personnels ? la pierre personnelle que nous sommes appelés à apporter pour faire avancer l’humanité.

Ce désir personnel profond, ce charisme personnel, nous le découvrons d’abord en agissant, en nous engageant (dans nos relations, nos études, notre vie professionnelle, nos loisirs…).

3) Cultiver sa liberté intérieure

L’indifférence intérieure est une condition à cette liberté : elle permet de n’être tenu à rien, de n’être esclave de rien : non pas pour ne rien désirer, mais pour permettre de découvrir notre désir profond et de le suivre. Sans être entravé par des dépendances (l’argent, la crainte de donner une mauvaise image de soi, le statut social, les on-dit, etc.)

4) Ne pas se laisser impressionner par divers «démons intérieurs»

Si nous sommes appelés à donner joyeusement le fruit qui n’appartient qu’à nous, plusieurs obstacles intérieurs attristants peuvent être des obstacles :

  • le manque de confiance en soi qui entraîne la tristesse de la jalousie et de l’envie (je ne vaux rien, les autres sont mieux que moi, font mieux que moi) ; le souci inquiet de l’image de soi (agir pour être bien noté par les autres), le rêve d’être quelqu’un d’autre que soi (c’est très bien d’être boosté par des personnes que nous admirons si cela ne nous dépersonnalise pas, si cela nous permet d’être nous-mêmes et de chercher à donner le meilleur en étant qui nous sommes) ;
  • la tentation d’agir pour autrui, à sa place. C’est toujours un risque pour ceux qui s’engagent au nom de leurs convictions profondes : croire que cela les autorise à faire le bien d’autrui à sa place. Pour les gens généreux, c’est une tentation sous l’apparence du bien.
  • la tentation du toujours plus : comme si l’on n’en faisait jamais assez, comme si l’on n’était jamais à la hauteur. Il peut aussi exister une forme d’orgueil. Préférons le conseil suivant : faire grandement les petites choses ; faire petitement les grandes choses : humilité et magnanimité. Et ne nous croyons pas trop indispensables. Nous ne pouvons tout faire et le bien que nous faisons, nous le faisons souvent sans en prendre conscience.

5) Comment savoir ce que je veux vraiment? Deux signes essentiels : la joie et la paix

Les auteurs spirituels l’ont vécu et enseigné depuis longtemps : la bonne décision, celle qui vient vraiment en profondeur du meilleur de moi-même, se reconnaît à ces deux signes : la joie et la paix intérieure.

Il est important que nos décisions de vie les plus importantes aient provoqué en nous ces deux états. Tant que nous sommes attristés, inquiets, perturbés, troublés, c’est que la décision n’est pas encore mûre et qu’il ne faut pas décider.

En revanche, signale, par exemple, saint Ignace de Loyola dans les Exercices Spirituels, quand une décision, une orientation de vie majeure, a été choisie dans la paix et la joie, il faut s’y tenir. Ne pas se laisser impressionner par le démon du doute, de l’inquiétude, qui ne manquera pas, ensuite, de chercher à nous ramener en arrière.

Surtout ne jamais prendre de grandes décisions sans le coup de la déception, de l’échec, de la déprime.

6) Et quand sont possibles plusieurs choix?

Ignace de Loyola et la spiritualité de l’ordre religieux qu’il a fondé (les Jésuites) proposent les critères suivants quand se présentent des choix variés, tous aussi conformes à notre volonté profonde :

Choisissons quelque chose qui est davantage meilleur sur l’un ou l’autre des points suivants :

  • le plus urgent ;
  • le plus durable ;
  • le plus universel ce qui aura la répercussion la plus large) ;
  • le plus « parfait » (Critère qualitatif qui peut s’opposer aux critères quantitatifs qui précèdent)

7) Développer sa vie intérieure pour décider

Ce repère pour décider aurait pu être placé en tête : il est un préalable indispensable. Souvent nous sommes incapables de choisir ou de bien choisir parce que nous nous laissons empêtrés dans le tourbillon de la vie, des sollicitations, des obligations.

Prenons le temps de nous arrêter pour faire le point. Sachons dire : « stop ! je réfléchis et me mets à l’écoute de ce que je veux vraiment. »

Si nous sommes croyants, la prière est un moment essentiel pour laisser se déployer notre vie intérieure et repérer ce que provoquent en nous les différentes alternatives auxquelles nous sommes confrontés. Ainsi nous pouvons sentir ce vers quoi nous nous sentons en profondeur joyeusement attirés. Prier consiste ici simplement se mettre devant Dieu comme étant notre créateur. Pour mieux nous apprécier nous-mêmes en découvrant qui nous sommes, qui Il a créé et pour quoi.

8) Le temps de la confirmation

Une fois la décision prise, le choix fait, s’y engager résolument. Sans se laisser impressionner par les doutes, les difficultés. Des signes de confirmation que c’est le bon choix viendront : y être attentifs pour se renforcer.

Si ces signes ne viennent pas, se poser malgré tout des questions. Réexaminer le processus de décision qui a mené à ce choix. Peut-être n’avons-nous pas été attentifs à quelque chose d’important. Peut-être faut-il discerner à nouveau.


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